Action

Définitions

« The sequence of events in a novel or a play. Aristotle’s definition of tragedy as “an imitation of an action” underscores his contention that action rather than character is the central element in a tragic play. What he seems to emphasize is not simply what te characters do but also what undelies their specific acts. The tragic action, for example, appears to be a threefold movement, characterizaed by the critic Kenneth Burk [(A Grammar of Movies, 1945)] as the “purpose, passion and perception” of the tragic protagonist: the tragic hero begns with a specific purpose, undergoes a trial by suffering (passion), and emerges with a fuler, although tragic, sense of his own identity (perception). The idea of speech as a form of action is a major principle of SPEECH ACT THEORY. »

QUINN, Edward, A Dictionnary of Literary and Thematic Terms, New York, First Paperback Edition, 2000, p. 3.

« (1) Broadly, the events of a dramatic work as presented on stage or in film, embodying the plot. In this sense, action includes both physical movement and speech. It may be distinguished from the story, the events behind the action but not necessarily portrayed for the audience. (2) More arrowly, the movements of the actors on stage or before the camera, as distinguished from speeches and inner, or psychological, movement. (3) Either of these concepts as applied to the events of nondramatic fiction, presented either dramatically or through narration. »

FRYE, Northrop, BAKER, Sheridan and George PERKINS, The Harper Handbook to Literature, New York, Harper and Row Publishers, 1995, p. 5

« nom masc. – Succession des événements qui constituent la trame d’une oeuvre littéraire ou d’un film. ETYM. : du latin actio qui désigne, comme en français, mais d’une façon plus abstraite, “le fait d’agir”. Le sens littéraire défini ci-dessus (le cinéma excepté, bien sûr) existait déjà en latin. Composante essentielle d’une oeuvre littéraire, l’action a cependant une importance variable d’une part selon les genres et d’autre part selon les théories littéraires. Elle est plus liée à la nature du théâtre qu’à celle de la poésie. Depuis Aristote qui en parle dans sa Poétique, elle a donné lieu à de nombreux débats (se reporter, en particulier, à “Unités (règles des”). C’est à l’époque moderne que l’action théâtrale se verra contestée dans son principe, d’abord par Brecht, puis par les auteurs de l’anti-théâtre et leurs successeurs. Brecht rompit la continuité dramatique par l’usage des “songs” pour établir entre la scène et le public une distanciation critique. Dans le théâtre expérimental de l’après-guerre, l’intrigue fit place à d’autres procédés d’expression comme le monologue ou le “happening”. L’action, c’est-à-dire l’enchaînement des événements qui constitue une histoire, a paru longtemps indissociable de la nature même de la fiction romanesque. Des tendances nouvelles ont cependant, à notre époque, proposé d’autres formes d’organisation du récit. Ainsi, dans les années 50, le courant du Nouveau Roman à [sic] remplacer le développement linéaire du “sujet” par des moyens indirects d’expression : le monologue intérieur (Claude Simon, Nathalie Sarraute) ou une écriture descriptive (Alain Robbe-Grillet) à l’origine de ce que Rolan Barthe a appelé “une école du regard”. » (FOREST, Philippe et Gérard CONIO, Dictionnaire fondamental du français littéraire, Paris, Pierre Bordas et Fils, 1993, p. 11-12.)

« 1. Didact. : Se dit du déroulement des événements d’un récit, d’un film, d’une pièce de théâtre. 2. Sémiot. narrat. : Les différentes manifestations d’un actant dans le récit. L’extrapolation d’une analyse des actions tendrait à déboucher sur une typologie des comportements individuels et sociaux. 3. Pragm. : Analyse des relations aux objets révélées par l’utilisation des signes. Ceci, notamment, selon les modalités de la “pragmatique” américaine développée par les travaux de Ch. W. Norris. » (Armentier, Louis, Dictionnaire de la théorie et de l’histoire littéraire du XIXe siècle à nos jours, Paris, Retz, 1986)

« Two basic meanings may be distinguished : (a) the main story (in cinematic jargon ‘story-line’) of a play, novel, short story, narrative poem, etc.; (b) the main series of events that togheter constitute the plot (q.v.). Action is fundamental to drama, and implies motion forward. Much action is achieved without physical movement on stage, or even without anything being said. An essential part of action is the unfolding of character and plot. » (J.A. Cuddon, The Penguin Dictionary of Literary Terms and Literary Theory, London, Penguin Group, 1992 [1976], p. 8.)

«Cette notion qui remonte aux origines de la réflexion sur le théâtre n’a jamais été sérieusement définie ni discutée. Et elle ne n’est toujours pas, soit que l’on s’en tienne aux lieux communs et au «cela va de soi», soit au contraire qu’on l’exclue jusque dans la terminologie. Pourtant, il n’est pas rare que le terme resurgisse aujourd’hui hors théâtre, sans que l’on soit toujours convaincu de sa nécessité. En premier lieu, il convient de revenir sur la définition théâtrale et d’expliciter ses inconvénients. L’action, c’est d’abord la partie de l’histoire qui commence au lever du rideau et se termine au baisser ; le risque étant que sa partie antérieure soit sous-estimée par l’analyse. Or, d’un point de vue fonctionnel (ou syntaxique), le lever du rideau n’a aucune incidence sur l’histoire – laquelle ne fait que continuer selon des modalités différentes. D’autre part, action constitue une cote mal taillée qui accrédite l’idée qu’au théâtre l’histoire et sa présentation seraient entièrement fusionnées ; d’où le terme unique au contraire du roman qui en a deux (histoire et récit). Mais l’expérience prouve que cette idée est une contre-vérité, qu’au théâtre aussi il faut distinguer – même si cela est difficile – un contenu événementiel et sa dramaturgie, une histoire et un discours. De quelque manière que l’on retourne le problème, action est donc un terme inadéquat, bancal et ambivalent : il ne prend pas en compte la totalité de l’histoire, il confond ce que l’analyse sait et doit distinguer.

Dans la mesure où elle disposait de termes-concepts appropriés, la narratologie stricto sensu n’avait pas besoin d’importer du théâtre un terme aussi ambigu. Pourtant, c’est ce que fait parfois Genette en lui donnant le sens d’histoire : ”… l’action d’Eugénie Grandet commence en 1789 et se termine 1833…” (Nouveau discours sur le récit, Le Seuil, 1983, p. 23). Là aussi, semble-t-il, l’introduction n’a d’autre raison d’être que la réticence à employer histoire. Pour être plus rare, la définition théâtrale n’en existe pas moins : l’action romanesque commencerait au début du récit, auparavant ce serait l’histoire. Au théâtre, il est, la distinction non représenté/représenté pouvait accréditer les deux termes. Mais c’est surtout dans le cadre de la sémiotique — ou en concertation avec elle – que la définition de l’action a été repensée ; le problème restant toutefois le même : dans quelle mesure le terme est-il pertinent ? Le Dictionnaire du théâtre ne pouvait pas ne pas parler de l’action ; parmi ses définitions, retenons celle qui implique précisément les actants : l’action consiste en la modification de la configuration actantielle, de surcroît elle est le niveau des actants, tandis que l’intrigue est celui des acteurs. On voit donc poindre là une tentative plus intéressante que les précédentes : l’action n’est plus partie (ou tout) de l’histoire, ni sa forme, mais sa réduction logico-narrative. Bien entendu, cette hypothèse de travail va dans le sens des efforts de la pure sémiotique. Laquelle voit dans toute action un jeu de programmes narratifs (et non plus un processus actantiel), “articulant une transformation hiérarchique entre un état initial et un état final”(A.-J. Greimas et J. Courtès, Sémiotique dictionnaire…, II, Hachette, 1986, p. 10).Autant dire que, au gré des actants, de la syntaxe narrative, de la narrativité, sinon du carré sémiotique. Or, sans avoir à le clamer sur tous les toits, elle en vient – ou en revient – là à concevoir l’action non plus sous l’angle fictif ou littéraire mais comme partie ou tout de la praxis (A.-J. Greimas et J. Courtès, Sémiotique dictionnaire…, p. 10). La sémiotique de l’action, lorsqu’elle recourt à J. Piaget, n’a en effet plus rien à voir avec la littérature ; ce qui est une façon de renouer avec la conception aristotélicienne selon laquelle la fable est l’imitation de l’action (praxeôs). (Gérard-Denis Farcy, Lexique de la critique, Paris, Presses universitaires de France, 1991, p. 25-27.)

Lectures

Raphaël Baroni a recours aux théories de l’action développées par la narratologie, et plus particulièrement aux compétences endo-narratives afin de décrire la dynamique de la tension narrative au sein du récit. Baroni doit à Bertrand Gervais la notion de « compétences endo-narratives », définies comme « des processus de saisie et d’identification [par le lecteur] des actions représentées discursivement, avant leur intégration à une narration » (Récits et actions. Pour une théorie de la lecture, Longueuil, Le Préambule (L’univers des discours), 1990, p. 17). Baroni investit deux dimensions plus ou moins négligées par les théories de l’action. D’une part, il tient compte des compétences (dont un savoir de l’action) que les sujets mettent en jeu pour produire et comprendre des récits. D’autre part, il se montre attentif aux processus événementiels de nature catastrophique, qui fournissent l’armature de nombreuses intrigues. En revisitant les différentes approches de l’action, il vise ainsi à saisir la manière dont le devenir incertain d’une action ou d’un événement est susceptible de structurer une intrigue et d’être éprouvé par les sujets. L’action se trouve donc étroitement liée à la tension narrative, au coeur de son ouvrage.