Catégorisation

Sont rassemblées ici les différentes typologies proposées par les théoriciens. On remarquera que certaines s’adressent aux analystes, puisqu’elles distinguent des structures à partir desquelles on peut saisir le personnage; d’autres établissent des distinctions entre les statuts ontologiques des personnages; d’autres encore circonscrivent les caractéristiques intratextuelles des personnages.

Les typologies formelles, substantielles

Dans l’article « Personnage » du Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, Todorov détermine deux genres de typologies représentant chacune différentes manières de classer le personnage dans les études.

Les typologies formelles: a) personnages dynamiques/statiques (cas du statique, le type) b) importance de son rôle dans le récit c) degré de complexité (plats/épais) d) selon le rapport entretenu par les propositions avec l’intrigue (soumis ou servis par elle)

Les typologies substantielles : a) rôles et caractères des personnages fixées une fois pour toutes, seules changent les actions (commedia dell’arte, comédie latine, classicisme, boulevard) b) Typologie « spontanée » théorisée par Propp : 7 sphères d’action qui réunissent un nombre précis de prédicats, correspondent à des rôles. Souriau, au théâtre, a déterminé de son côté des fonctions dramatiques (le représentant du bien souhaité, l’opposant, l’arbitre, la ressource). c) Greimas a synthétisé les deux typologies et a introduit la notion d’actant (Sujet, objet, destinateur, destinataire, opposant, adjuvant). Leur relation forme le modèle actantiel. Le personnage est conçu en dehors de tout prédicat, contrairement à Propp.

Sphères mimétique, thématique, synthétique

Phelan (1987) propose de décrire le personnage selon une sphère mimétique (les traits du personnages et l’illusion anthropomorphique), selon une sphère thématique (le personnage représentant une idée ou une classe sociale) et selon une sphère synthétique (the material out of which the character is made) ou, selon notre terminologie, la textualisation des procédés de caractérisation.

Grille d’analyse de Jouve, basée sur la théorie de Pavel :

Examen des frontières du personnage à travers 1) sa parenté avec des figures mythiques 2) la mise en évidence de son caractère fictionnel (l’importance ontologique que le narrateur lui concède) 3) son degré de réalité (certain, probable, possible).

Examen de la distance qui sépare le monde fictionnel du monde du lecteur à travers 1) l’éloignement culturel 2) la tonalité (style, écriture distante) 3) lisibilité (personnage plus ou moins facile à situer)

Examen de la densité référentielle du personnage 1) ouverture des personnages aux données extra-textuelles 2) orchestration narrative simple ou complexe 3) rapport entre récit (mode diégétique) et scènes (mimétique) 4) finalité narrative plus ou moins forte (plus elle est forte, plus grande sera la densité).

Examen de l’incomplétude du personnage : soulignée par des procédés antimimétiques ou compensée par 1) des procédés mimétiques 2) l’intégration à un mythe de la complétude.

Autochtones/indigènes, immigrants, substituts

Ces épithètes ont été proposées par Meinong; elles sont reprises mais critiquées par Pavel. a. Personnages et objets autochtones : inventés ou créés par l’auteur du texte b. Personnages et objets immigrants : viennent du monde réel ou d’autres textes c. Personnages et objets substituts : objet réel dont les propriétés ont été considérablement modifiées.

Surnuméraires, référentiels

Distinction établie par de Rescher : personnage supernumerary (totalement inventé) et personnage actuality variant. Division reprise par Jouve et Margolin.

Référentiels, embrayeurs, anaphoriques

Typologie sémiologique proposée par Hamon.

a) Signes référentiels (qui renvoient à une réalité extérieure)/ personnages référentiels (historiques, mythologiques, etc.)

b) Embrayeurs (les déictiques, par exemple, qui renvoient à une instance d’énonciation, à un contenu flottant qui ne prennent sens que dans une situation concrète de discours)/personnages-embrayeurs (marques de la présence en texte de l’auteur, du lecteur, de leurs délégués, personnages porte-parole, choeurs, interlocuteur socratique, Watson…)

c) Signes anaphoriques (certains emplois du nom propre, les articles, dont le contenu est uniquement fonction du contexte auquel il renvoie)/personnages-anaphoriques (tissent dans l’énoncé un réseau d’appels et de rappels, personnages prédicateurs, mémoire, sème ou interprète des indices…) Un même personnage peut être a, b et c.

Flat/round

Dans Aspects of the novel, San Diego, Harcourt, (1927) 1985, E. M. Forster classe les personnages selon leurs qualités/fonction/importance dans le développement du récit et aboutit à deux catégories, les flat et les round. Les premiers ont deux dimensions, ils sont relativement peu compliqués et ne changent pas. Les round sont plus complexes, ils évoluent, prennent une voie qui peut parfois surprendre le lecteur.

Le stéréotype constitue le prototype du flat character. Dyer va distinguer le stéréotype du type social. Ce dernier est une figure reconnaissable, il appartient à une société avec laquelle le lecteur est familier; les stéréotypes sont plutôt des ready-made images of the unknown. Les types sociaux peuvent intervenir dans à peu près n’importe quelle fiction, alors que les stéréotypes transportent avec eux an implicit narrative. Richard Dyer, “The Role of Stereotypes”, The Matter of Images: Essays on Representations, New York: Routledge, 1993.